Grand-messe de rentrée dans les Alpes de Haute-Provence : incompréhensions chroniques

Le CDEN de rentrée, avec bilan comptable de la part de la DSDEN, et budget de fonctionnement 2025 de la part du Département, s’est tenu le 10 octobre à Digne.

Exercice périlleux et convenu à la fois. Avec d’un côté nos administrations qui égrènent leurs chiffres et nous montrent, tableaux à l’appui, que tout est au mieux, et de l’autre la perception de terrain des collègues et des parents d’élèves, moins optimiste.

Tout va très bien Monsieur le DASEN (air connu)…

Pourtant, voyez donc : les moyennes d’élèves par classe restent constantes à quelques centièmes d’élèves près, la répartition des moyens dans les établissements, un peu en baisse mais pas trop, mais il faut bien prendre en compte la « lente érosion démographique » avec 100 élèves de moins dans le 1er Degré et même, même ! qu’on a ouvert deux postes (0,5 à l’EE de Mison, 0,5 conseiller ASH et 1 titulaire remplaçant zone Sisteron sud), même qu’on est allés les chercher sur des moyens « nationaux ».

Tout est au mieux, on vous dit ; même si une classe ferme sur les quatre que comptait l’école de Bras d’Asse, même si on accorde moins de décharges aux directeur et directrices. Bien sûr, les classes multiniveaux vont compliquer le travail des enseignants et l’apprentissage des élèves ; bien sûr la gestion en permanence des situations difficiles, comme dans l’Ecole Paul Martin de Digne s’ajoutant à la prise en responsabilité d’une classe conduit les personnels au burn-out, mais la Moyenne fait foi, qui prouve que l’équité des moyens et l’égalité des chances est respectée sur notre territoire.

Certes, il y a curieusement 111 élèves de plus en collège – visiblement, l’érosion s’arrête en CM2. La faute serait au solde migratoire positif. Mais comme on avait prévu une baisse, pas de poste supplémentaire pour ces élèves venus d’ailleurs, qui se serreront un peu plus dans les classes. Seule bonne nouvelle pour ces derniers, l’UPE2A « provisoire » du collège Camille Reymond à Château-Arnoux va être pérennisée.

… mais la réalité est têtue

Alors que l’administration retient que 72% des écoles ont des moyennes par classe inférieures à 21 élèves et qu’un tiers des collèges d’environ 20 élèves, les organisations syndicales retiennent que dans 10% d’écoles les maîtres et maîtresses ont des classes de 26 élèves en moyenne (on a même relevé un cas de classes en maternelle à 29 élèves !) ; que la moyenne dans le reste des collèges se situe à 24,5 élèves par classe, et autour de 26 pour plusieurs d’entre eux.

Monsieur l’Inspecteur d’Académie, nous savons, nous, ce que veulent dire vos moyennes si bien lissées. Ce sont des classes frôlant parfois 30 élèves ; des classes souvent hétérogènes, incluant des élèves en situation de handicap, ou des élèves allophones. La CFDT a demandé si les besoins en termes de présence d’AESH identifiés par la MDPH étaient couverts ; si la prise en charge horaire des élèves allophones était suffisante ; et combien de postes restaient encore non pourvus ou non remplacés à la rentrée (exemple du collège de Banon sans cours d’italien depuis septembre…) : pas de réponse – pour l’instant tout au moins.

Sur le plan pédagogique, nous aurons tout de même appris qu’à titre expérimental, une « prépa 2nde » est ouverte au Lycée David Neel à Digne, comptant 4 élèves, un recrutement d’une dizaine reste envisagé. Cela a été possible, car les arrêtés ont pu être publiés avant la période démissionnaire, ce qui n’est pas le cas pour le projet rendant obligatoire l’obtention du DNB pour l’entrée en 2nde – tant mieux – et questionne donc sur la légitimité de ce dispositif. On espère bien sûr en attendant que les élèves actuellement impliqués en tirent profit.

Il fait bon vivre et enseigner dans les Alpes de Haute-Provence

Il y avait aussi les tableaux présentés par le Conseil Départemental. Le budget prévisionnel est certes globalement en hausse, et pour certains établissements de manière sensible, ce qu’ont relevé les représentants du personnel et qui a motivé leur choix de l’abstention au moment du vote. Mais c’est au prix d’une saignée des fonds de roulement, ce qui limite de fait l’autonomie des établissements et complique le travail des enseignant.e.s pour obtenir des moyens – petit matériel, photocopie, déplacements dans le cadre d’un projet. On nous répond qu’en cas de « coup dur » le Conseil Départemental sera toujours là pour mettre la main à la poche ; qu’une subvention de 1000 euros est toujours ouverte dans chaque établissement pour des déplacements intra-départementaux (spectacles, visites, animations…). Là encore, tout est simple selon les tableaux, beaucoup moins quand nous sommes confrontés aux réalités du terrain. Et même si cela ne fonctionne pas si mal dans les collèges, cela va-t-il durer ? Le Département du Nord a décidé cette année de récupérer les 230 000 euros de budget alloués au dispositif « Collégiens au cinéma », et tant pis pour les 30 000 élèves concernés… Le budget que l’exécutif prépare pour l’Education nationale, autant que les « efforts » demandés aux collectivités invite à la vigilance.

Pour lire la Déclaration liminaire de la CFDT